(Michel Falardeau) – Depuis quelques semaines, j’ai le plaisir de partager mes billets sur l’Économie mondiale avec vous. Je suis un résident du Haut-Saint-Laurent à la retraite. Passionné par toutes les questions qui bouleversent la planète, je suis de près ce qui se passe sur plusieurs continents et cela même durant mes vacances. Nous sommes tous dépendants l’un de l’autre et de plus en plus notre économie est directement liée à celle de l’Asie par exemple.
L’ascension rapide du prix de l’essence a le don de susciter de vives passions chez plusieurs d’entre nous. Rares sont les personnes qui y demeurent indifférentes. Nos fréquents déboursés aux stations d’essence et les nouvelles incessantes dans les médias nous tournent continuellement le fer dans la plaie. Dans un dossier qui sera publié jeudi prochain (1er mars) et intitulé Pourquoi le prix de l’essence a-t-il explosé de 67% en moins de trois ans ?, je tenterai d’exposer les facteurs qui expliquent la hausse fulgurante du prix de l’essence ordinaire au Québec de 0,80 $/litre en 2009 à près de 1,34 $/litre aujourd’hui; j’essayerai également d’en dégager les tendances lourdes pour l’avenir.
Pour l’instant, je vous partage les nouvelles économiques qui ont capté mon attention au cours des derniers jours :
La situation économique ne s’améliore pas encore en Grèce
À la veille de la rencontre de l’Eurogroupe portant sur l’approbation, ou non, du second plan de sauvetage de la Grèce, le Fonds monétaire international (FMI) lançait une véritable bombe au sein de ce groupe des ministres des Finances de la zone euro : après une mise à jour de ses données économiques, le FMI révélait que, même en tenant compte de toutes les mesures d’austérité acceptées récemment par la Grèce, sa dette publique ne serait réduite que de 160% à 129% de son produit national brut en 2020, ratant ainsi la cible convenue de 120%. Et même plus : un document de travail fourni aux membres de l’Eurogroupe les avertissait que les mesures d’austérité pourraient enrayer l’économie grecque au point que la cible de 120% pourrait être complètement hors d’atteinte et de loin. Pareilles perspectives avaient de quoi faire dérailler les négociations en apportant de l’eau au moulin de certains pays européens déjà réticents à aider davantage un partenaire qui, à leurs yeux, s’avérait, coup après coup, un véritable gouffre financier sans fond…
Malgré tout, l’Europe décide finalement de se serrer les coudes
Et pourtant, au lieu de lancer la serviette et malgré les coups de gueule lancés par certains de leurs représentants, les pays européens se sont à nouveau serré les coudes pour trouver une solution au problème en abaissant rétroactivement les taux d’intérêt qu’ils chargent sur leurs prêts à la Grèce et en demandant à leurs banques centrales de retourner à la Grèce les profits qu’elles pourraient réaliser sur leurs investissements dans les bonds grecs. Ces nouvelles concessions permettraient, selon leur modèle de projection économique, de ramener le niveau de la dette grecque en 2020 à 120,5% de son produit national brut.
Mais la Grèce doit accepter des conditions plus sévères
En échange, ses partenaires européens ont exigé de la Grèce que le groupe de travail chargé de « conseiller » Athènes sur la mise en place des réformes assure une présence permanente dans le pays et y soit doté d’un pouvoir de contrôle accru sur les actions budgétaires du gouvernement. Les fonds européens seront gérés à partir d’un compte « sous écrou » et ne pourront pas être utilisés à d’autres fins que le remboursement de la dette grecque; ils ne seront libérés par les créanciers publics que graduellement à la condition que la révision trimestrielle de sa situation démontre que la Grèce se conforme bien aux termes de l’entente… Un accord de solidarité certes, mais aussi de discipline comme le soulignait si bien M. Jean Leonetti, ministre français des Affaires européennes.
La balle est retournée dans le camp de la Grèce
Maintenant, c’est aux deux partis politiques de la coalition grecque qu’il revient d’implanter les mesures d’austérité convenues au cours des semaines qui viennent, ce qui relève presque du suicide politique juste avant les élections d’avril… Et s’ils le font, comment réagiront les électeurs grecs ?… Rééliront-ils un gouvernement avec le mandat d’appliquer le plan d’austérité exigé par les partenaires européens ou mettront-ils au pouvoir une nouvelle équipe qui s’opposera à la poursuite d’une telle approche ?… Ce sera finalement à chacun d’eux qu’il reviendra de prendre une décision démocratique en exprimant clairement ses volontés dans le secret de l’isoloir.
La cote de crédit de la Grèce est abaissée
L’été dernier, l’agence de cotation Fitch avait averti qu’elle considérerait toute perte de la part des créanciers privés de la Grèce, fusse-t-elle volontaire, comme un défaut de paiement. Elle vient de joindre l’acte à la parole en abaissant de deux coches la cote de crédit de la Grèce.
Après vous, ma chère…
Depuis quelques mois, le FMI cherche à relever de 500 milliards de $US sa capacité de prêt de façon à être mieux en mesure de réagir à la crise européenne et à d’autres urgences. Mais les membres du G-20 qui étaient en réunion les 25 et 26 février au Mexique, ont reporté leur décision à ce sujet jusqu’à ce que les pays membres de la zone euro aient eux-mêmes statué, au début de mars, sur l’ampleur du coupe-feu à mettre en place pour empêcher la crise des dettes souveraines de s’engouffrer en Espagne et en Italie.
L’Iran se dit prêt à reprendre les discussions nucléaires
L’Iran souhaite reprendre rapidement les négociations avec les grandes puissances sur son programme nucléaire. Des représentants de l’Agence internationale de l’énergie atomique se sont rendus sur place une deuxième fois en moins d’un mois pour tenter d’éclaircir certains points de ce programme qui entretiennent le doute sur son véritable objectif. Ils sont une fois de plus revenus bredouilles tout en précisant que l’Iran avait triplé sa production d’uranium enrichi à 20%. L’uranium a besoin d’être enrichi à 5% seulement pour pouvoir s’en servir à des fins civiles, mais à plus de 90% si on veut l’utiliser à des fins militaires. L’enrichissement à 20% est considéré, par plusieurs pays, comme une étape vers la production d’uranium enrichi à 90% et, de ce fait, comme une provocation et une menace de la part de l’Iran. Mais l’Iran réfute régulièrement tout projet en ce sens.
Pour sa part, le général Martin Dempsey, chef d’état major des forces armées américaines, croit qu’il n’est pas clair que l’Iran veuille se doter de l’arme nucléaire et qu’une intervention militaire serait donc prématurée.
L’Iran accentue sa pression sur l’Europe en mettant ses menaces à exécution
Joignant l’acte à la parole, l’Iran a interrompu ses approvisionnements pétroliers à la France et au Royaume-Uni, les deux pays fer-de-lance de l’embargo du pétrole iranien décrété par l’Union européenne. Cette action est hautement symbolique puisque les importations de pétrole iranien ne représentent plus que 3% des besoins de la France alors que le Royaume-Uni a déjà pratiquement cessé de s’approvisionner auprès de l’Iran. Mais l’Iran a aussitôt étendu sa menace aux autres pays européens si l’Europe poursuit ses « actions hostiles » à son égard; l’Iran comble notamment 30% des besoins en pétrole de la Grèce et 13% de ceux de l’Italie. L’Union européenne, de son côté, cherche déjà à passer des accords avec l’Arabie saoudite et les Émirats arabes unis pour prendre la relève de l’Iran.
La Chine stimule encore son économie
Les dirigeants chinois ont, pour une seconde fois en deux mois, abaissé le ratio de liquidité exigé de 21% à 20,5% pour les grandes banques et de 19,0% à 18,5% pour les plus petites dans le but d’accroitre les fonds disponibles pour les prêts et de contribuer ainsi à relancer davantage son économie.
La Chine s’attaque au marché de l’automobile en Europe
Après avoir acheté Volvo de Ford et avoir acquis une part d’une usine de Fiat en Italie, les Chinois viennent d’installer leur première usine d’assemblage d’automobiles en Europe : elle sera opérée conjointement par China’s Great Wall Motor Company and Bulgaria’s Litex Motors. Il y a quelques années, c’étaient les Américains et les Européens qui formaient des « joint ventures » en Chine. Mais tout comme les Japonais ont envahi les marchés européens et américains il y a quelques années, les Chinois se préparent à faire de même aujourd’hui…
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Voici les liens pour lire les billets précédents de Michel Falardeau :
- La décote de plusieurs pays (18 février 2012)
- Dossier : L’Europe pourrait-elle sortir grandie de la crise des dettes souveraines (15 février2012)
- La Chine, Las Vegas, la Grèce & plus (12 février 2012)
- Dossier : Le prix du baril de pétrole bientôt à 200 $ US (8 février 2012);
- Économie mondiale : Le premier billet de Michel Falardeau (5 février 2012).
Merci de nous aider à comprendre ce qui se passe en Grèce. Les commentaires du Général Martin Dempsey concernant l’Iran semblent tout au moins rassurants.