(Anne Minh Thu Quach) – Il sera question une fois de plus d’environnement dans notre billet mensuel. Il faut dire qu’après avoir permis l’exploitation immodérée des océans, le gouvernement conservateur s’apprête à faire de même avec les lacs et les rivières du Canada en éliminant purement et simplement la protection environnementale prévue dans la Loi sur la protection des eaux navigables.
Vous n’en aviez pas entendu parler? C’est normal: les conservateurs ont dissimulé ce changement de cap majeur au fin fond des 400 pages de leur projet de loi monstre C-45. Ils auraient voulu passer sous silence cette attaque frontale contre l’écologie marine qu’ils n’auraient pas fait mieux…
Le NPD, toutefois, n’a pas été dupe. Mes collègues et moi avons rapidement mis le doigt sur le bobo: en faisant disparaitre toute référence à l’environnement de ce texte législatif important, qu’ils ont d’ailleurs rebaptisé Loi sur la protection de la navigation, les conservateurs mettent en péril le fragile équilibre de la nature canadienne.
La lecture des changements apportés par C-45 a en effet de quoi faire frémir. Si cette loi est adoptée, 99,9% des rivières et 99,7% des lacs du pays ne seront plus protégés par le gouvernement fédéral, qui ne s’occupera désormais que de 97 lacs, 62 rivières et les trois océans. Sur les 37 cours d’eau ayant un intérêt patrimonial, seulement 10 feront l’objet d’une protection. Notons d’ailleurs que 90% des lacs et rivières encore protégés se retrouvent, très curieusement, dans des circonscriptions représentées par des conservateurs…
Ainsi, il ne sera plus nécessaire de demander un permis pour démarrer un projet de construction au-dessus des eaux navigables, à l’exception des cours d’eau majeurs comme le fleuve Saint-Laurent. Dorénavant, les citoyens qui veulent empêcher la construction d’un ouvrage – une école de kayak qui voudrait s’opposer à l’apparition d’un pont sur sa rivière, par exemple – devront ainsi traîner les responsables devant les tribunaux, ce qui équivaut à un renversement du fardeau de la preuve.
Tout cela, bien entendu, sans parler de l’attitude arrogante du gouvernement, qui a procédé à ces changements sans consulter personne, pas même les communautés autochtones qui jouissent de ces rivières et de ces lacs depuis des générations.
C-45 s’annonce comme l’un des pires saccages de la protection environnementale de notre histoire. Les conservateurs ont déjà abandonné les océans; peuvent-ils faire amende honorable et agir, pour une fois, en faveur du bien commun?
Anne Minh-Thu Quach
Députée de Beauharnois-Salaberry à la Chambre des communes,
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Vous pouvez lire ou relire les chroniques précédentes d’Anne Quach :
- Environnement – Il faut sauver les lacs expérimentaux (20 octobre 2012) ;
- Un garde-manger en danger (22 septembre 2012) ;
- Maison écolo à Sainte-Martine et développement énergétique (24 août 2012);
- Nos parcs nationaux en péril (17 juillet 2012);
- Anne Quach en direct de Rio+20, la conférence des Nations Unies (22 juin 2012);
- C-38, environnement et générations futures (24 mai 2012);
- 10 mois déjà ! (19 mars 2012).
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