(Jean-Pierre Major) – La problématique du manque de personnel et de la carence marquée en centres d’hébergement de soins de longue durée à Salaberry-de-Valleyfield et dans Vaudreuil-Soulanges affectent depuis des mois l’urgence de l’Hôpital du Suroît.
Les employés de l’urgence et de l’ensemble de l’établissement sont débordés. Le rythme est insoutenable. Ce matin des employés et conseillers syndicaux de la Fédération interprofessionnelle de la santé (FIQ) ont fait un point de presse pour dénoncer la situation et interpeller les hauts dirigeants du CSSS du Suroît, de l’Agence de la santé et des services sociaux de la Montérégie et du Ministère de la Santé et des services sociaux du Québec.
Les intervenants étaient Ariane Benoit, vice-présidente mission-hôpital du Syndicat des Professionnelles-ls en Soins du Suroît (SPSS), Francine Savoie, présidente du SPSS et Daniel Gilbert, 2e vice-président de la Fédération interprofessionnelle de la santé du Québec (FIQ).
D’entrée de jeu, Ariane Benoit a rappelé qu’en octobre dernier, le SPSS avait alerté la direction générale de la situation à l’urgence qui, à ce moment là, était à 214%. On prédisait même un taux d’occupation des civières au-delà du 300% pour la saison hivernale et c’est justement ce qui s’est concrétisé depuis le début de l’année. Depuis l’automne, l’Hôpital du Suroît « roule » a une moyenne de 49 patients sur civière à son urgence, alors que le nombre prévu est 22! Depuis janvier c’est régulièrement plus de 60 patients sur civières. Une situation dangereuse pour le personnel et non adaptée pour les patients. Le nombre de toilettes ou de douche à l’urgence n’a pas changé parce que le nombre de patients double ou triple. La disponibilité des équipements (prévue 22 patients à la fois) est aussi compliquée et par ricochet le niveau d’intimité, de dignité et de respect en prend un coup.
-La direction n’a pas les budgets-
Pour Francine Savoie la présidente du Syndicat des Professionnelles-ls en Soins du Suroît affilié à la FIQ la direction n’est pas nécessairement à blâmer, les budgets sont manquants. L’Agence de la santé et des services sociaux de la Montérégie et même le ministère devraient venir constater sur place la problématique. « En ce moment on compte l’argent, on veut respecter les budgets et l’on oublie les patients et le personnel essoufflé. En 1 an, 26 510 heures supplémentaires ont été effectuées par les professionnelles en soins du CSSS du Suroît, de ce chiffre, 50% uniquement pour l’urgence. Ce n’est pas tout, depuis janvier déjà 420 heures ont effectuées en temps supplémentaires. Il faut des solutions transitoires maintenant », affirme la présidente Mme Savoie. Elle souligne que le personnel est à bout de souffle et désabusé. Pour les infirmières, c’est extrêmement difficile. « Les filles sont malheureuses. Elles restent en temps supplémentaire par solidarité », ajoute Mme Benoit.
Francine Savoie mentionne aussi que si l’on ajoute des ressources à l’urgence, l’administration de l’hôpital est dans l’obligation budgétaire de compenser en coupant ailleurs et cela créer aussi des problématiques sur les unités de soins.
La création d’une seconde unité de débordement transitoire pourrait être une solution. Mme Savoie rappelle qu’en 2012, il y a l’ajout de 20 lits en CHSLD dans la région. Cela a eu un impact positif sur l’urgence… pour cinq jours. En 2013, il y a eu 30 lits additionnels en CHSLD. Cette fois l’impact a été plus près de trois jours. Francien Savoie fait le constat que « La direction du CSSS du Suroît a et fait des efforts, mais cela prend plus parce que cela ne change pas ou peu. On n’en sort jamais. Aujourd’hui on demande l’aide de l’agence de la santé et des services sociaux de la Montérégie et de l’aide du Ministère de la Santé et des services sociaux ».
-Un engorgement hors du commun-
Daniel Gilbert de la FIQ intervient pour dire qu’on se retrouve avec un engorgement hors du commun. Il souligne à juste titre que la population des MRC de Beauharnois-Salaberry et de Vaudreuil-Soulanges a le droit de recevoir des soins et services adéquats. L’Agence reçoit jour après jour les données sur l’occupation de l’urgence de l’Hôpital du Suroît. Pourtant rien ne change. M. Gilbert souhaite aussi que les responsables de l’Agence de la santé et des services sociaux viennent constater sur place la problématique et prennent en compte la situation.
Lors de la période de questions, les intervenants du point de presse sont revenus sur le fait que la direction du CSSS du Suroît n’a pas les leviers pour mettre en place des solutions permanentes. Les unités de débordement fonctionnent sans budget sur une base temporaire. En voyant la situation se dégrader constamment, plusieurs infirmières se questionnent sur leur avenir au sein du réseau de la santé. Aussi, en mettant trop de pression sur le personnel, on augmente le risque qu’il prenne de mauvaises décisions. Il y a d’ailleurs beaucoup de tensions entre le personnel au sujet des patients.
Lors d’une visite à l’urgence, il est facile de constater que plusieurs patients n’ont pas d’affaires là. Une grande proportion des civières de l’urgence sont occupées par des personnes âgées en attente de place dans des CHSLD. Le manque de places en hébergement de soins de longue durée fait en sorte que l’urgence ne peut plus fonctionner adéquatement. Plusieurs patients sont aussi à l’urgence parce qu’ils n’ont pas de médecin de famille.
-Une croissance démographique et des besoins grandissants-
Depuis le début de l’année 2014, le taux d’occupation des civières à l’urgence dépasse les 300% et rien ne change. Cela n’augure rien de bon pour l’avenir puisque la région du Suroît et particulièrement Vaudreuil-Soulanges connaît depuis une douzaine d’années une croissance démographique hors du commun. Le gouvernement du Québec (autant sous les libéraux que les péquistes) est en réflexion depuis des lunes sur la possibilité d’établir un centre hospitalier dans Vaudreuil-Soulanges. C’est un réel besoin, mais il y a plus important; du personnel et des centres d’hébergement de soins de longue durée.
Comme le décriaient ce matin les employés et représentants de la FIQ, la situation est critique. Il y a un véritable manque de médecins de famille dans la région jumelé à une mauvaise analyse des gouvernements sur les besoins dans la région de Salaberry-de-Valleyfield et de Vaudreuil-Soulanges.
La majorité des urgences des centres hospitaliers connaissent des périodes de pointe dans l’année. Cela se passe surtout en janvier après la période des fêtes et avec les grands froids. Certains hôpitaux du Québec dépassent même les 200% de taux d’occupation des civières de leur urgence durant ces périodes de pointe, mais des taux de plus de 300% depuis autant de jours prouvent qu’il y a des carences plus grandes dans notre région. On dirait vraiment que Québec a abandonné le Suroît en matière de santé 🙁
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